- Ça va, c'est toujours aussi grand, ça me rassure. s'amusa Juliette avant de retirer ses chaussures et sa veste. Bah je vais te prendre un verre d'eau déjà.

Elle garda son sac sur son épaule et se dirigea directement vers l'immense cuisine où elle avait déjà pris un grand nombre de repas. Après avoir ouvert 3 placards différents (en effet, elle avait largement eu le temps d'oublier où les choses étaient rangées), elle attrapa un verre qu'elle remplit avec l'eau d'une carafe qui se trouvait sur l'îlot central. Elle sortit ensuite un de ces fameux cachets qu'elle prenait depuis 3 jours pour effacer les désagréments de la grossesse (bien qu'elle essayait à tout prix d'oublier qu'elle les prenait à cause de cela) de son sac et l'avala avec une gorgée d'eau.

Mégane avait suivi son amie dans la cuisine. Elle l'avait regardée prendre un verre d'eau et ce mystérieux cachet. Cela faisait désormais plus de 13 ans que les deux amies se connaissaient et la sœur d'Aurore et Sephora n'était pas dupe, Juliette avait toujours été ce genre de personnes chanceuse n'ayant jamais mal à la tête, ou presque. Cela l'aurait donc étonné que le médicament qu'elle prenait soit un doliprane ou quelque chose de ce genre.

- Qu'est ce que t'as pris ?

Juliette se retourna vers la Poisonel d'Orée et lui afficha un petit sourire gêné tandis qu'elle rangeait rapidement la boîte de médicaments dans son sac. Elle n'avait pas spécialement envie de dire la vérité, ce n'était pas qu'elle ne faisait pas confiance à Mégane mais elle ne se sentait pas d'en parler. Ou tout du moins, pas pour le moment.

- Rien, je me sens pas très bien en ce moment c'est pour ça. répondit la Turenko, ce qui n'était pas totalement un mensonge, avant de vite changer de sujet. Bon on mange quoi?

La jeune fille posa doucement sa main sur l'épaule de la roumaine.

- S'il y a quoi que ce soit, tu peux me le dire tu sais. assura-t'elle tout de même avant de s'arrêter pour réfléchir On commande un truc, y'a personne pour cuisiner. On prends ce que tu veux puisqu'on a le temps.

La brune continua en se dirigeant vers les escaliers menant à sa chambre. En effet, son ordinateur était dans sa chambre et, bien qu'il y en avait d'autres dans la maison, elle préférait utiliser le sien dans lequel tous ses identifiants étaient enregistrés. Elle s'installa sur son lit et tendit l'ordinateur à Juliette.

- Non mais ça va, t'inquiète pas. répondit la roumaine avec un petit sourire avant d'hausser les épaules.

Juliette acquiesça ensuite à la proposition de Mégane. Elles auraient pu se faire à manger mais ce n'était pas vraiment dans les habitudes de la Poisonel d'Orée de faire les choses par elle-même. Elle suivit donc sa meilleure amie jusqu'à sa chambre puis se jeta sur le -gigantesque- lit avant de saisir l'ordinateur qui lui était tendu.

- T'as une idée spéciale? Elle regarda l'heure sur l'écran de l'appareil. Evy elle doit être en nerfs là. Je suis sûre qu'elle me cherche. annonça la jeune fille en riant doucement.

Après une petite hésitation, Mégane se dit qu'il serait peut-être mieux de revenir à la charge plus tard. Elle savait pertinemment que son amie avait un problème, encore fallait-il qu'elle-même l'assume.

- Prends ce qui te fait envie je m'en fous. affirma-t'elle d'abord avant de bifurquer sur cette gamine qu'elle ne supportait déjà plus Non mais ta Evy c'est une chieuse de première je sais pas ce que vous lui trouvez tous, surtout toi. T'étais désespérée ou quoi ? On dirait Lafaye ! À croire qu'ils sont de la même famille.

Alors que les deux adolescentes discutaient, une boule de poil arriva sur le lit et s'installa près d'elles. C'était Icone, le spitz nain que la Poisonel d'Orée avait eu pour ses 12 ans.

- Elle a l'air reloue comme ça mais franchement elle est cool faut juste que t'apprennes à la connaitre. annonça Juliette avant d'éclater de rire en entendant la comparaison que venait de faire la Poisonel d'Orée. Tu crois pas si bien dire. ajouta la roumaine avant de s'exclamer: Icone !!

Avec un grand sourire, elle accueillit le petit chien qui s'installa sur elle et commença à le caresser d'une main tout en cherchant ce qu'elles allaient manger de l'autre. Au bout d'un moment, elle cliqua sur un restaurant japonais sans réfléchir, cependant ce fut au moment où elle allait demander à Mégane si cela lui allait que cela lui revint un tête: enceinte. Elle avait toujours entendu dire que les femmes ne pouvaient manger de sushis durant la grossesse. Elle ne savait pas ce que cela faisait, elle était presque sûre de vouloir avorter mais dans le doute, elle cliqua bien vite sur la flèche pour revenir à la page précédente puis termina par cliquer sur une pizzeria. La pizza, c'était très bien, classique.

Il fallut quelques secondes à la Poisonel d'Orée pour comprendre ce que lui disait la roumaine.

- C'est elle la nièce de Lafaye ? s'écria la brune, quand son amie acquiesça, elle haussa les épaules et poursuivit d'un petit air moqueurLa famille de rêve. Et tu vas me dire que lui aussi il va devenir cool ?

Tout en parlant, Mégane observait l'écran de l'ordinateur sur lequel se faisait la commande. Elle attendait simplement que Juliette fasse ses choix afin de pouvoir payer.

- Mais oui c'est elle ! Enfin c'est pas sa nièce de sang hein. Lafaye est marié à la soeur jumelle de sa mère. Enfin bref... Pizza, ça te va? Je vois pas quoi prendre d'autre là et ça me saoule de chercher. demanda Juliette en se tournant vers Mégane alors qu'elle caressait toujours la petite boule de poils allongée sur ses jambes.

- Ça la rend encore plus détestable. finit par conclure la sœur de Sephora avant d'affirmer que des pizzas lui convenaient parfaitement

Il ne fallut pas longtemps au repas pour arriver. Les deux avaient mangé dans le salon, devant un film. Elles ne l'avaient d'ailleurs pas vraiment suivi puisqu'elles avaient préféré papoter. Les deux jeunes filles n'eurent plus qu'à faire la sieste, voilà une après-midi bien plus appréciable que des cours interminables...

Malgré sa discussion avec Mégane, Juliette n'avait pu réussir à tant se changer les idées que ça. Elle n'avait qu'une chose en tête, sa dispute -ou plutôt son déchirement-avec Steven et cette grossesse. Sa vie qui semblait pour l'instant totalement gâchée, en outre. Depuis qu'elle savait tout cela, c'était comme si elle ne pensait qu'à cela. Comme si son cerveau tournait en boucle avec les mêmes images, les mêmes sons, les mêmes idées.
Elle sentait bien qu'elle avait besoin de se confier, qu'elle en avait trop sur le coeur, mais elle ne savait pas comment la Poisonel d'Orée allait réagir, ni comment aborder ce sujet qui la rendait si mal depuis quelques temps. Cependant, quand elle s'allongea de nouveau sur le lit de Mégane, ce fut comme si tout ce qu'elle retenait en elle venait d'exploser. Et, sans crier gare, elle fondit en larmes.

Mégane se tourna rapidement vers son amie en l'entendant pleurer. Elle ne savait pas pourquoi elle pleurait, c'était Juliette, il ne fallait parfois pas chercher et simplement l'aider et, cela, ses proches le savaient. C'est pour cela qu'elle se contenta de blottir son amie contre elle tout en lui caressant les cheveux silencieusement. Seuls les sanglots de la roumaine pouvaient s'entendre dans la grande pièce.

- Qu'est ce qu'il t'arrive Juju ? finit-t'elle par demander tout en continuant de la serrer contre elle Je savais que ça allait pas. Depuis que je suis rentrée t'es toute triste y'a que ce matin où tu avais l'air de bonne humeur. Aussi, tu ne parle plus à Steven. Vous vous êtes disputés ? Ça va lui passer il t'aime trop, t'en fais pas.

Une fois dans les bras de Mégane, Juliette se laissa aller. Cela faisait plus qu'un long moment qu'elles ne s'étaient pas vues, en effet, mais la Poisonel d'Orée restait toujours une de ses meilleures amies. Et la Turenko savait qu'elle était là pour elle, qu'elle pouvait se sentir en sécurité et non jugée.

- Non c'est fini, il me déteste. Je... j'ai déconné. bafouilla la jeune fille alors que son corps était secoué de sanglots. Mais c'est pas ça le pire. continua-t-elle d'une voix entrecoupée, comme si cette aveu lui coupait le souffle.

La surprise de Mégane se vit facilement sur son visage. Elle se blottit davantage contre son amie avant de poursuivre :

- Alors qu'est-ce que tu as ?

Certes, elle aurait voulu savoir à quel point Juliette avait déconné, peut-être en rajoutait-elle. Ce qui était sur, c'est que ce n'est pas de cela dont la Turenko voulait parler, c'est pour cette raison qu'elle ne dit rien d'autre.

Juliette, les yeux brillants de larmes, rencontra le regard de son amie avant de poser sa tête entre son épaule et son cou. De cette manière, elle ne lui faisait plus face, et ainsi, c'était sûrement plus simple pour elle d'avouer le secret qui lui pesait sur le coeur.

- Je suis enceinte... souffla la roumaine, d'une voix presque inaudible, alors que sa bouche était contre l'épaule de son amie.

Enceinte... ce mot eut quelques difficultés à être assimilé par Mégane. Voilà une nouvelle qu'on n'entendait pas tous les jours...

- Ah ouais... c'est à propos de ça que tu as déconné ? demanda-t'elle avant de s'arrêter pour réfléchir Non, attends, c'est Steven qui t'as mise enceinte ou quelqu'un d'autre ? s'exclama-t'elle d'un coup, réalisant que les deux "meilleurs-amis" avaient peut être fini par... se rapprocher ?

La Turenko resta complètement blottie contre Mégane. Elle séchait ses larmes peu à peu. Elle avait tant pleuré depuis ce début de mois de Janvier qu'elle se demandait comment elle pouvait encore trouver la force de sangloter.

- Steven... répondit simplement la jeune fille d'une voix remplie de sanglots. Elle n'avait jamais vraiment dit à Mégane comment sa relation avait évoluée avec le Fontaine-Mazar mais la Poisonel d'Orée n'était pas dupe, loin de là.

En effet, cela ne l'étonna pas, tomber enceinte d'un inconnu, ça n'était pas le genre de Juliette, elle n'avait peut-être qu'embrassé cette autre personne, elle n'en savait rien, là n'était pas la question pour le moment. Elle avait bien plus important à faire ; consoler son amie.

- Ça fait longtemps ? Qu'est ce que tu vas faire ? finit par interroger la "plus âgée" des deux

Juliette garda le silence durant quelques secondes. Les deux questions de Mégane étaient plus que pertinentes, car, en réalité, elle n'en savait rien.

- Je sais pas... Je le sais que depuis samedi, c'est tout. avoua la Turenko, les yeux baissés. Je sais pas. Avorter, peut-être? Je... je sais pas. J'ai peur.

- Oh, c'est que des cellules hein ! Si t'es dans les temps ça sert à rien de te casser la tête. Ça sent rien, c'est comme quand tu tond le gazon, t'as pas l'herbe que va crier "ah au secours on m'assassine !". Alors t'en fais pas. Tu en as parlé à quelqu'un d'autre ? déballa rapidement la brune

Juliette regarda Mégane et lui afficha un petit sourire. Elle avait raison, et elle était sûrement la première à lui offrir de vraies paroles rassurantes depuis le samedi précédent. Heureusement qu'elle était là...

- J'étais chez Evy quand je l'ai su... Y'avait aussi sa mère, Mathilde, Clara. Elle fit une petite pause. Tu sais, elle est adorable Evy, mais elle m'aide pas. Je crois qu'elle comprend pas ce que je ressens, parce que sa mère avait mon âge quand elle l'a eue.

Mégane laissa échapper un soupir.

- Mais laisse tomber. Elle est paumée cette gosse on dirait. Moi je suis là. Je vais t'aider, je suis à côté maintenant.

Sur ces paroles, les deux adolescentes s'endormirent. Quand la Turenko ouvrit les yeux, elle fut prise d'un élan de panique, son cours de danse allait commencer dans peu de temps, elle devait partir. L'autre soucis était qu'elle n'avait pas ses affaires, elle ne pouvait donc pas se changer. Dans une grande générosité, Mégane suggéra à la roumaine de lui emprunter un pantalon, même si celle-ci portait une taille plus petite. Elle demanda ensuite à André, son chauffeur, de les déposer toutes les deux. En arrivant, Mégane tomba nez à nez avec Addison, en un échange de regard et un bonjour, les deux adolescentes semblaient se connaître depuis toujours. Comme si un coup de foudre avait eu lieu entre les deux. La Poisonel d'Orée ne resta pas pendant les deux heures. C'est pour cela que, sur le chemin du retour, elle partit à la recherche du compte Instagram de sa nouvelle amie afin de pouvoir faire plus ample connaissance.